• Alexandre Zinoviev le Grand

     

    Alexandre Zinoviev le Grand

     

     

     

     

     

     

    Voici le premier livre d'Alexandre Zinoviev, paru en 1976 et édité en France et intitulé :  Les Hauteurs béantes

    Scientifique avant tout, il devient écrivain par nécessité : la société totalitaire qui s'est crée en "soviétie" le pousse à le faire. Ce qu'il décrit, c'est la force manipulatrice (l'idéologie) à l'oeuvre dans le totalitarisme. Cette subtilité conduit les critiques à le décrire comme un écrivain du 21ème siècle, différent en cela des auteurs russes qui décrivirent les effets de ce totalitarisme, comme Soljetnitsyne .

    Alexandre y décrit l'enfermement mental d'un peuple (soviétique) avec un humour acerbe, féroce, quasi inégalé à ce jour. (à mon humble avis). C'est aussi la parfaite description de notre époque. Nous sommes dans la même situation, sur informés, ne comprenant pas le monde dans lequel nous sommes sans y être, submergés de « choses donnant envie d'autres choses », enfermés dans des schémas mentaux dont nous ne voulons même pas être conscients.

    La bêtise est générale, le paysage audiovisuel et littéraire est occupé par des apparatchiks incultes, glosant sans fin sur ce qu'ils faudrait faire, ce qui n'a pas été fait, ce qui ne se fera pas, abrutissant la population qui se laisse abrutir avec allégresse, toujours d'accord avec le dernier diktat du moment. L'essence, l'âme du présent et de l'avenir humain n'est qu' Economie. ( productivité, délais d'exécution, croissance avec les dents ou sans dents, sont les outils de ce conditionnement socio historique que nous vivons, occidentaux ou pas !!!)

    Voici quelques petits extraits de ce livre et comparez : Attention, truculence truculence !

    Alexandre Zinoviev le Grand

     

    Principes méthodologique (D'une étude sur le fait que les Ivaniens – les habitants d'Ivanbourg - vivent en accomplissant des mesures historiques alors même qu'ils n'en savent rien et n'y participent pas)

     Page 10 : 2 groupes prirent part à cette mesure historique : les questionnés et les questionneurs. Ces groupes étaient constitués des mêmes personnes. Les questionnés savaient qu'ils étaient l'objet d'une surveillance. Les questionneurs savaient que les questionnés étaient au courant. Les questionnés savaient que les questionneurs savaient qu'ils étaient au courant. Et ainsi de suite.(...) Les questionnés étaient guidés par les principes suivants : 1 – on n'y peut rien  2 – qu'est ce que ça change 3 – on s'en fout. Comme le démontra le collaborateur, ces principes entraînent logiquement les corollaires suivant : 4 – de toute façon c'est inévitable ; 5 – et puis enfin, il est grand temps de ; 6 -qu'ils aillent tous se faire...

    Par contre, les questionneurs s'en tenaient aux principes suivant : 1 – de toute façon ils n'y couperont pas ; 2 – ils déballeront tout d'eux même 3 – ils liquideront tout d'eux mêmes. (….) Grâce aux principes exposés, on réussit à augmenter la production de l'information inutile et à réduire les délais d’exécution. La mesure historique devint entièrement auto nongérée et, comme tout mesure bien conçue et appliquée avec conséquence, elle se termina en queue de poisson.

     

    page 349 : Ce qu'ils ignoraient, c'est que toute leur conversation avait été non seulement écoutée, mais aussi enregistrée. Et aussi qu'une décision avait été prise à leur sujet, en conséquence. On les laisserait travailler. Et quand leur travail serait fini, alors... Il y avait tout de même eu un progrès dans cette société. Surtout dans le domaine de l'écoute et de l'enregistrement.

     

    Oui, il y a eu un certain genre de progrès. Et ce qui est appréciable avec ce livre, c'est qu'il est possible de l'ouvrir à n'importe quelle page pour entamer ou poursuivre sa lecture. Une œuvre indémodable, sauf fin du monde.

    Bonne lecture... et amusez vous bien.

    Alexandre Zinoviev le Grand

    L'université de Moscou, ou résida Zinoviev

    « Aller à Albas...Il s'en passe... »